samedi 5 mai 2012

2 Days in London

* Ce dinosaure est heureux d'être à Greenwich *


La semaine dernière, avec Nyamuk, nous avons décidé de partir à Londres, un peu à l’improviste. Mais comme on est des oufs, on a choisi de partir en bus comme des gros routards. Beaucoup m’ont demandé comment fait un bus pour traverser la Manche. Je vais donc dévoiler ce mystère absolument insoutenable : le bus roule jusqu’à Calais et prend la direction de l’Eurotunnel. Là, le bus se glisse dans un train, qui rentre dans le tunnel, qui lui-même est sous l’eau. C’est incroyable, mais vrai (une référence culturelle se cache ici).

 Londres, j’y suis allée pas loin de dix fois, dans mes souvenirs. Je n’ai jamais rien compris à cette ville, et je me perds à chaque fois que j’y retourne. C’est toujours la même histoire : je sais pertinemment que je suis déjà passée dans tel ou tel quartier, mais je ne reconnais rien, et surtout, je suis incapable de me faire une image géographique de l’endroit. Je crois que mon cerveau rejette Londres. 

 Enfin bref, nous avons passé deux jours à gambader dans les rues, à prendre des photos, à rouler dans les parcs et à admirer les oiseaux. Car si Londres n’est pas vraiment ma ville préférée, je dois avouer qu’ils sont sacrément chanceux niveau volatiles. En marchant simplement dans Hyde Park et St James Park, nous avons pu observer quantité d’espèces dont nous n’avions aucune idée du nom. Nyamuk voyait des canards chinois partout,  et il n’avait pas tout à fait tort, car en faisant une recherche Google Image sur le canard chinois, on voit – en dehors des canards laqués – à peu près tous les oiseaux qu’on trouve dans les parcs londoniens. Mais il n’y avait pas que des canards chinois. Nyamuk a pu s’émerveiller pendant des heures devant ses amies les poules d’eau pendant que je m’attendrissais devant le pigeon en rut courtisant la pigeonne qui n’en a pas grand-chose à faire. La danse nuptiale du pigeon est peut-être une des manifestations naturelles qui me fascinent le plus dans la vie. La manière dont ils gonflent le cou et font trainer leur queue, en tournant autour de la femelle tout en faisant des tours sur eux-mêmes. Fascinant. Et ce petit regard désappointé lorsque, le temps d’un tour, la  pigeonne s’est envolée sans que le pigeon s’en aperçoive. Ca n’a pas de prix. Bref, pour tout ça, Londres aussi m’a gâtée, puisque nous avons eu l’incroyable chance d’assister à la cérémonie de rut la plus longue jamais observée. Et malgré une bonne cinquantaine de tours autour de la pigeonne, le pigeon n’a pas pécho. La pigeonne est difficile. Il faut dire que la pauvre se fait tourner autour tous les jours, toute l’année, alors que quand même, les animaux sont censés avoir des saisons de reproduction, non ? N’ayant aucun répit, je peux comprendre qu’elle finisse par se lasser. De là à faire un parallèle entre la pigeonne et la Parisienne qu’on reproche d’être toujours froide face aux sollicitations perpétuelles de la faune dans les bars, il n’y a qu’un pas. Que je fais, en effet. 

 On pourrait donc penser que ce qui m’aura le plus marqué pendant ce séjour à Londres, c’était les pigeons – et dans ce cas, c’était bien la peine d’aller jusque là bas alors qu’on en a des caisses à Paris, n’est-ce pas ? 

 Hé bien non. 

 Ce qui m’a le plus marquée dans ce voyage à Londres, ça a été le retour. Parce que, comme je disais plus haut, étant des gros routards, on avait pris le bus. Et au retour, à la surprise générale, le bus n’est pas rentré dans le train qui rentrait dans le tunnel qui passe sous l’eau, non, le bus a pris le FERRY. Immédiatement, je me suis sentie revenir des années en arrière, les années collège et les voyages en Angleterre. J’étais alors amoureuse d’un magnifique brun aux yeux bleus qui sortait avec celle qui me semblait être la plus laide de l’école. Je m’étais imaginée des histoires follement tragiques et romantiques sur l’île de Wight où nous allions passer une semaine. Evidemment, rien de tout ça n’est arrivé, mais j’avais maintenant beaucoup mieux puisque j’embarquais sur un ferry avec Nyamuk. Une espèce de revanche sur le temps qui m’a donné envie de faire un mariage chinois dans le fond du bus, mais là encore, Nyamuk a dit non. Peut-être parce qu’il était encore vexé du coup des canards chinois, puisque je ne l’avais pas cru. 

 La traversée s’est faite sur un petit ferry sur lequel nous avons partagé un fish & chips, puis essayé de trouver un canapé confortable. Quand le Graal a été trouvé, la traversée était finie, ce qui laissait un petit goût d’inachevé. Retour donc au bus dans la soute, et descente à Calais où nous étions deux jours plus tôt.

 Dans la dernière partie du voyage, de Calais jusqu’à Paris, je me suis pas mal demandée pourquoi j’avais été aussi enthousiasmée par des pigeons en rut que je ne regarde plus quand je suis chez moi, et une traversée en bateau qui n’avait rien d’exceptionnel. Je me suis aussi demandé pourquoi mes amis qui partent vivre à l’étranger gardent un souvenir très négatif de la France, alors que les étrangers que je rencontre à Paris sont au comble de l’extase d’être dans la capitale du fromage. 

 C’est la THEORIE DE L’EMERVEILLEMENT.
Le fait qu’il suffisse parfois d’un tout petit renouveau pour que tout soit plus excitant.

 C’est étonnant comme il suffit de peu de choses pour que les éléments les plus anodins deviennent tout d’un coup absolument magiques, pour peu qu’on les décale un peu ou qu’on porte un autre regard sur eux. Il suffit de mettre les pigeons à Londres, ou de ne pas prévenir qu’on rentrera en ferry et pas en Eurotunnel. Il suffit parfois d’un petit déplacement pour que tout reprenne de ses couleurs. 

 Ca fait longtemps, maintenant, que je veux partir vivre quelques temps à l’étranger. Parce qu’après vingt cinq ans à Paris, je me dis qu’il faut raviver un peu ma vision de la vie, lui redonner un peu de lustre. Et s’il faut partir dans un autre pays pour que les pigeons en rut me fasse à nouveau rire, alors je prends.