*Entre Lund et Göteborg*
Cette fois, Noël est bien installé en Suède. Ca a pris du
temps, mais les lumières dorées sont maintenant allumées dans toute la ville. Il
y a des sapins, et surtout de la neige. Elle s’est mise à tomber il y a une
semaine. Intensément, sans s’arrêter, une pluie continue de boules de coton qui
ont formé un épais tapis blanc, partout autour de nous.
Timing parfait : c’était justement le week-end pendant
lequel Nyamuk et moi avions prévu d’aller à Göteborg. J’ai rêvé des marchés de
Noël de Göteborg quand j’ai commencé à rêver de la Suède, je crois. Le plus
grand marché de Noël de Suède. Le plus beau d’Europe. Mes attentes étaient
élevées.
Jusqu’à présent, ma
référence en matière de marchés de Noël restait Strasbourg. Il y a quelques
années, j’y allais souvent, tous les ans, pour déambuler entre les stands
remplis de babioles plus ou moins kitsch, en mangeant des flammenküche sur des
baguettes avec un verre de vin chaud, me gavant au passage de bredele et de
chants traditionnels. J’attendais toujours cette période avec impatience et
j’aurais pu y rester des journées entières, malgré le froid, même après en
avoir fait trente fois le tour.
Nous sommes partis très tôt le samedi matin. Je voulais
arriver le plus rapidement possible. Idée qui paraissait terrible la veille au
soir en réglant le réveil à 5h45, mais merveilleuse finalement. Nous avons pris
le bus pour aller à Göteborg, quatre heures de route accompagnées par le lent
lever du soleil sur la neige fraiche. Ce voyage m’a rappelé l’excitation de mon
périple en bus dans le Golden Circle en plein hiver islandais. J’ai encore en
tête les images de la lumière de jour qui semble avoir du mal à se sortir du
lit, qui s’étire, se remet sous la couette, et donne l’impression d’abandonner
pour trainasser sous les draps plutôt que de complètement se lever. Il y a des
couleurs vraiment particulières, ici, au lever du soleil. On dirait un
crépuscule inversé. Un entre deux difficile à décrire mais qui m’émerveille à
chaque fois. Autant dire que malgré le peu d’heures de sommeil de la semaine,
je n’ai quasiment pas fermé l’œil du voyage. J’étais trop occupée à coller mon
nez à la fenêtre en écoutant des chansons des années 60 (et à prendre des
photos à mettre sur Instagram).
*Marché de Noël de Liseberg *
Les marchés de Noël ont finalement été un peu décevants –
mais il faut avouer que la barre était placée haut avec ceux de Strasbourg.
Nous en avons visité deux dans le centre, mais le meilleur était celui de Haga,
un quartier fait de petites rues pavées pleines de cafés cosy. L’attraction
touristique de Göteborg, sans doute,
mais comme je disais à une cousine il n’y a pas si longtemps, il faut
relativiser ce qu’on appelle « touristique » en Suède… qui n’atteint
jamais le niveau de ce qu’on peut connaitre en France. Dans une des rues, des
stands avaient été installés, avec ce qu’on trouve habituellement sur les
marchés de Noël, sans vin chaud ni flammenküche mais avec des empanadas… allez
comprendre. Le lendemain, nous sommes allés à Liseberg, le parc d’attraction au
cœur de la ville, également habillé aux couleurs de Noël. Là aussi, l’allée
avec les stands était finalement petite, mais il y avait suffisamment de cafés
et de restaurant pour nous réfugier quand nos mains étaient trop glacées, et
nous gaver de gâteaux à la pomme, à la cannelle, et de chocolat chaud.
* Pause chaleur dans un café de Liseberg *
Finalement, ce qui nous aura le plus marqués à Göteborg, ce
sera peut-être tout ce qui n’était pas suédois !
Nous sommes allés à l’Universeum, un musée qui abrite
notamment une immense serre tropicale et de grands aquariums remplis d’une
multitude de poissons, y compris des requins. Nous sommes restées des heures à
nous balader dans la chaleur moite de cet endroit, à regarder les singes et les
perroquets en liberté dans la serre tropicale, à frissonner devant les requins
et les cobras (qui n’étaient pas en liberté, eux) et à nous rappeler nos
souvenirs d’Indonésie et de la Monkey Forest, avec ses singes qui piquaient nos
affaires pour les refourguer à des gardes qui font payer les touristes pour
récupérer ce qu’on leur a volé. En plus des animaux, j’ai admiré dans cet
endroit la discipline des visiteurs. Il n’y avait personne pour assurer la
sécurité (où alors, ils étaient cachés dans les plantes), mais je n’ai pas vu
une seule main se tendre pour caresser les plumes des flamands roses ou essayer
de toucher les singes minuscules qui vivaient leur vie à 10 cm de nous.
* Les occupants de l'Universeum *
Le soir, nous avons mangé dans un restaurant thaïlandais
sur lequel j’avais littéralement flashé en passant devant : le Moon.
L’intérieur était entièrement décoré de plantes tropicales et de lampions de
toutes les couleurs. Il ne manquait plus que le sable et nous étions de nouveau
à Padangbaï, à l’est de Bali, dans ce petit restaurant à côté de l’hôtel que
nous avions loué, et dans lequel un Américain s’efforçait d’animer la soirée en
grattant sur une guitare désaccordée pour accompagner sa voix tout aussi juste
que les notes qu’il sortait de son instrument. Cette fois, nous étions en
Suède, il faisait -10°C dehors, et je buvais le premier mojito depuis mon
arrivée ici. Nous avons reparlé de nos voyages. De la vie ici. De la vie
là-bas. Nous avons rêvé un peu en dévorant nos assiettes.
Je me souviens. Lorsque j’ai commencé à écrire dans mes
carnets qui me suivent partout, j’ai tout de suite pris l’habitude de toujours
noter le lieu, la ville et le pays dans lequel je me trouvais. J’avais une
dizaine d’années, et c’était un peu déprimant d’écrire à chaque fois
« Issy les Moulineaux, France », ou « Le Theil, Basse Normandie,
France ». En fait, non, ce n’était pas déprimant parce que je ne rêvais
pas spécialement de voyager à cette époque. J’avais l’esprit plus occupé par
Leonardo DiCaprio et David Boreanaz. Mais c’était comme si je sentais que cette
envie viendrait un jour. Chaque fois que j’allais dans un endroit différent,
pour les vacances par exemple, je me forçais à écrire un texte, juste pour
pouvoir noter fièrement un autre nom de ville. Comme une collection. C’est
ça : j’ai commencé à collectionner les noms de lieux avant d’avoir envie
de voyager.
Je ne sais pas exactement quand cette envie là est née.
Peut-être au Danemark, dans cette école de musique dans laquelle je suis restée
trois jours mais qui aura fait basculer beaucoup de choses dans ma vie. Ou en
Islande, quelques mois plus tard, en regardant cette lumière paresseuse qui ne
s’élevait jamais au-delà du doré sur les mottes de neige. Cette lumière que j’ai retrouvée entre Lund et
Göteborg et qui chaque fois me tire par la main pour me donner envie d’aller
plus loin.
*Mojito on the Moon *
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